- A une semaine de la finale, Barbara Pravi, la représentante de la France, a effectué ce samedi sa deuxième répétition avec sa chanson Voilà sur la scène de la Ahoy Rotterdam (Pays-Bas).
- La chanteuse reste, au côté du groupe italien Maneskin, l'une des favorites pour la victoire.
- « Barbara Pravi parvient à créer une connexion avec le public à travers l’écran. Si je devais miser sur quelqu’un pour la victoire, je parierai sur elle », affirme Matt Fredricks du site ESC United.
De notre envoyé spécial à Rotterdam (Pays-Bas)
Ce samedi, à l’issue de leur deuxième répétition sur la scène de la Ahoy Rotterdam, à une semaine de la finale de l’Eurovision, le groupe italien Maneskin et la Française Barbara Pravi ont fait forte impression. Si bien qu’ils sont désormais au coude à coude parmi les favoris des bookmakers pour la victoire. A l’heure où nous écrivons ces lignes, l’Italie est désormais en tête devant la France.
Chat tricolore craignant l’eau froide, on se rappelle qu’en 2011 Amaury Vassily était jusqu’au dernier moment le numéro 1 côté pronostics et qu’il avait fini quinzième… Une déconvenue sur laquelle personne n’a eu le temps de s’appesantir car, le soir même éclatait l’affaire DSK qui allait occuper tout l’espace médiatique.
Plus récemment, en 2018, Madame Monsieur, avait longtemps été dans le trio de tête des favoris et avait dû se contenter d' une treizième place. Même chose pour Amir en 2016, qui avait tout de même terminé dans le Top 10, en sixième position, une satisfaction en soi. De quoi modérer les emballements. Ceci dit, faire un tour dans la salle de presse de l’Eurovision n’a pas aidé à mettre nos espoirs de cocorico en sourdine.
« La plus applaudie de toutes les premières répétitions »
« Le problème avec Amir et Madame Monsieur, c’était la mise en scène. Barbara Pravi propose une performance bien différente », nous dit le journaliste William Lee Adams, créateur de Wiwibloggs, l’un des sites de référence du concours. « Elle est very French, elle correspond à l’idée que l’on se fait de la France, à l’élégance, au respect pour l’art. C’est elle qui a été la plus applaudie de toutes les premières répétitions », note-t-il.
« La première répétition s’approchait de la perfection, la deuxième est allée encore plus loin. Le tapis étoilé a été ajouté et je trouve que c’était une bonne chose, ajoute William Lee Adams. Le passage avec les oiseaux [des volatiles stylisés qui se détachent de sa silhouette projetée au sol] est magique. »
On relance en lui demandant si Gjon's Tears, le candidat suisse qui présente lui aussi une chanson émouvante en français, ne pourrait pas lui mettre des bâtons dans les roues au moment de recueillir des points… « Avec lui, il se passe beaucoup de choses qui peuvent distraire de l’émotion. La performance de Barbara est plus simple, on se concentre sur son visage, on se connecte plus facilement à elle car la mise en scène est davantage épurée », juge-t-il avant de livrer son conseil : « Je lui dirais d’économiser son émotion pour la finale. Là, ce sont les répétitions, il n’est pas nécessaire d’être déjà aussi intense ».
On tente d’obtenir un autre son de cloche quelques tables plus loin auprès de Matt Fredricks du site ESC United. Il se trouve que Voilà est l’une de ses chansons préférées de cette édition. « Barbara Pravi parvient à créer une connexion avec le public à travers l’écran. Si je devais miser sur quelqu’un pour la victoire, je parierai sur elle », affirme-t-il.
« Un choix parfait pour l’Eurovision »
Quand on lui demande s’il ne pense pas que l’Italie ou Malte peuvent être plus fédérateurs auprès du public, il répond par la négative. « La France a davantage de potentiel que ces deux pays pour plaire à la fois aux jurys professionnels et aux téléspectateurs. Au pire, j’imagine un scénario à la Duncan Laurence, qui l’avait emporté il y a deux ans, en se classant deuxième des deux côtés. » On tente alors de savoir si un morceau en français, estampillé chanson française, n’est pas clivant. « Non, quand une chanson est bonne, elle transcende toutes les niches », nous rétorque l’Américain.
On se décide alors à aller voir un confrère italien, qui aura peut-être quelques critiques acerbes à formuler envers les concurrents transalpins. C’est tout le contraire. « J’aime tellement Voilà !, assure Enrico Picciolo. J’ai suivi la sélection française et quand j’ai vu la prestation de Barbara Pravi, j’en ai eu la chair de poule, je me suis instantanément dit que c’était un choix parfait pour l’Eurovision. Elle est touchante. J’aime l’atmosphère intimiste. C’est une bonne idée de focaliser l’attention sur elle. »
Mais quand même, les Maneskin sont de sérieux prétendants à la victoire avec leur scénographie moderne et l’énergie qu’ils déversent sur le plateau, non ? « Ce sont des bêtes de scènes, c’est la première fois que l’Italie fait une telle proposition à l’Eurovision, mais le rock de ce groupe est très référencé années 1970. » On lui oppose que Voilà, s’inscrit dans une tradition de la chanson française remontant au-delà. « Je ne crois pas qu’il faille proposer de la modernité à tout prix à ce concours. Il faut une bonne chanson », balaye le confrère.
« Les gens voudront-ils être transportés en France ? »
C’est finalement en ligne que l’on trouvera un avis un brin discordant sur les chances de Barbara Pravi. Alesia Michelle couvre cette édition depuis Washington, via la salle de presse virtuelle mise à disposition des médias n’ayant pas pu faire le déplacement. L’Américaine a suivi toutes les répétitions pour les analyser sur sa chaîne Youtube. « Barbara Pravi est une autrice et compositrice très talentueuse avec une grande créativité. Elle a de très fortes chances de gagner, mais quelque chose me dit que ce n’est pas dans la poche, nous répond-elle. Malte, l’Islande – deux pays qui n’ont jamais gagné l’Eurovision – ainsi que l’Italie sont de sérieuses adversaires et peuvent prétendre à un très bon résultat du côté des votes du public. Il est très difficile de prédire qui va gagner cette année en raison de la pandémie. Les gens ont envie de s’échapper et vont pencher pour des chansons qui vont les transporter. Voudront-ils être transportés en France ? »
Lors de la conférence de presse qui a suivi la deuxième répétition, Barbara Pravi a assuré qu’elle ne ressentait pas trop de pression par rapport à sa position chez les bookmakers. « Le seul boulot que j’ai à faire, c’est de chanter. Après, le reste n’est pas dans mes mains », glisse-t-elle. Les jurys professionnels et les téléspectateurs décideront et il est encore impossible de dire avec certitude à qui ils attribueront leurs points. La finale s’annonce pleine de suspense.
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