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«Justice League», quoi qu’il en cut - Libération

Justice League, c’est les Rapaces de l’époque : un film aussi maudit que celui d’Erich Von Stroheim, fantasmé et martelé sur les réseaux par les amateurs (#ReleaseTheSnyderCut), retaillé et mutilé par le studio Warner et Joss Whedon. Le récit de ce blockbuster (Superman est mort, BatBenAffleck rassemble les apôtres, Superman ressuscite) est certainement moins intéressant que ses coulisses : comment Warner, échaudé par la vision crépusculaire de Zack Snyder, impose le réalisateur des Avengers pour l’alléger, l’éclaircir à l’écriture, retourner des scènes entières et livrer illico le film en 2017 afin que les cadres du studio touchent leurs primes de fin d’année ; comment l’acteur Ray Fisher, interprète de Cyborg, dira avoir souffert du comportement abusif de Whedon sur le tournage.

Morgue béate

Snyder aura eu plus de chance que Von Stroheim, et l’opportunité de reprendre et finir sa copie. Voilà donc une version de quatre heures, avec son auteur tout heureux d’apposer sa marque partout (Justice League est diffusé au format carré, pas en hommage à la télé cathodique mais au fait que le film fut tourné au format Imax, à destination de salles de cinéma équipées).

Face aux superhéros, c’est d’abord la morgue béate de Snyder qui frappe. Wonder Woman et consorts ne peuvent être que des demi-dieux à magnifier en contre-plongée, à tailler comme des statues de lumière dans les ténèbres, à fétichiser à force de ralentis. Le cinéaste fonce donc dans son genre chéri depuis 300, épitomé de son intérêt pour le surhomme moulé : le péplum. Et livre dans cette gamme le meilleur passage du film où les Amazones se passent à cheval une boîte magique, poursuivies par Steppenwolf (pas le groupe de rock born to be wild mais un méchant dont l’armure semble avoir fusionné avec un service de couverts en argent).

Ailleurs, loin de l’esthétique fonctionnelle de la concurrence Marvel, ses scènes en décélération oscillent entre long clip musical et porno expérimental façon Derrière la porte verte, comme lorsque le super-rapide Flash sauve une victime sur fond d’éclairs jupitériens dilatés et de reprise de Song to the Siren (mythologie !).

De la chair aux personnages

Se faire plaisir et faire plaisir aux fans comme un gosse, c’est l’adage de Snyder lorsqu’il filme Aquaman suivi par un choeur de groupies islandaises – dont l’une s’empresse d’humer le chandail qu’il vient d’ôter –, ou lorsqu’il tourne spécialement pour cette version une nouvelle scène, franchement dispensable, avec le Joker (Jared Leto dans sa lecture crispante sous crack du clown meurtrier que nous avait fait oublier la version oscarisée sans diazépam de Joaquin Phoenix). Son sens du kitsch passe en vérité mieux ici qu’il n’aurait pu en salle.

Même si en ces temps de «contenus», la distinction n’a plus vraiment court, ce Snyder Cut est plus une minisérie qu’un film. Avec un découpage assumé en chapitres qui permet de souffler si on le désire entre deux tableaux, le Snyder Cut est meilleur que la version de Whedon, qui lui était aussi digeste qu’un naan kebab. En donnant forcément plus de chair aux personnages (dont Cyborg), Snyder bat ironiquement à plate couture le papa de Buffy sur le terrain narratif de ses débuts. Justice Poétique League, in fine.

Zack Snyder’s Justice League de Zack Snyder, disponible en VOD.

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