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CÉSAR - Les visages d’Adèle Haenel et Aïssa Maïga sont encore dans tous les esprits, alors que l’édition 2021 des César a lieu ce vendredi 12 mars depuis l’Olympia et diffusée en direct sur Canal+. L’an dernier, par leurs mots ou leurs gestes, elles avaient dénoncé tout ce que le monde du cinéma reprochait à cette Académie: dysfonctionnement, opacité des comptes, cooptation, manque de parité et de diversité... Douze mois plus tard, ces César seront-ils les premiers d’une nouvelle ère?
C’est en tout cas le message que devrait défendre Roschdy Zem, président de la cérémonie. Le lauréat du César du meilleur acteur en 2020 pour “Roubaix, une lumière” a laissé entendre que cette “nouvelle ère” serait au cœur de son discours d’ouverture. “Je l’évoquerai dans ma prise de parole en début de cérémonie. On a un héritage à laisser. Il faut laisser l’endroit encore plus propre qu’on ne l’a trouvé. Car il ne l’était pas tellement”, indique-t-il dans un entretien fleuve aux Inrocks. “J’ai vécu des formes de violence que je n’ai pas envie que mes enfants vivent. Je ne peux pas vous dévoiler mon discours, que je dois encore travailler, mais c’est un message envoyé à la jeunesse.”
Autre signe positif en ce sens, le choix de Marina Foïs en maîtresse de cette 46e cérémonie. L’actrice et humoriste avait été l’une des instigatrices de la tribune signée par 400 personnalités et publiée en février 2020 qui réclamait une “réforme en profondeur” de l’Académie des César. Entourée de Laurent Laffite et Blanche Gardin pour l’écriture de ses monologues, elle assure qu’elle “ne s’interdit rien”. “Il y aura du premier degré, de la légèreté, du sérieux, du politique, du distancié, de l’absurde”, promet-elle tout en soulignant que s’il a fallu “passer par la violence” de l’an passé, “maintenant la discussion est possible”.
“Parité, diversité et démocratie” aux César 2021
Et pour cause, depuis l’année dernière et la démission collective du conseil d’administration de l’Association pour la promotion du cinéma, qui régit l’Académie, la refonte de cette institution française est en cours. Un binôme paritaire, formé par l’ancienne patronne d’Arte Véronique Cayla et le réalisateur Éric Toledano, en a pris la présidence pour les deux prochaines années. Les statuts ont été modifiés pour que ceux qui prennent les décisions soient tous des membres élus, supprimant au passage les membres “de droit” qui siégeaient jusqu’alors, notamment au titre de leurs prix et récompenses passés, à l’image de Roman Polanski.
Le nombre de membres qui peuvent voter a également été élargi avec quelque 500 nouveaux entrants et des binômes paritaires ont été formés pour représenter les différents métiers du cinéma. “La parité, la diversité et la démocratie sont les trois critères que nous avons définis pour montrer rapidement l’évolution”, explique Véronique Cayla à Télérama. “Nous avons changé les règles d’adhésion, de façon à rendre l’accès plus facile pour les femmes, les jeunes et les personnes issues de la diversité”.
“Entre les nouveaux statuts, la transparence et la démocratie en marche et cette présidence paritaire, le socle est bon”, confirme pour Le HuffPost Sandrine Brauer, productrice et co-président du collectif 50/50 qui assure que “beaucoup de professionnels sont entrés dans la discussion”. Pour elle, Véronique Cayla et Olivier Toledano sont des “personnalités fédératrices” qui ont “déjà démontré une forme de probité et d’équité” en formant tout de suite des instances paritaires notamment. “Il vont maintenant faire entrer encore de nouveaux votants, de la jeunesse, de la diversité”.
Car si Éric Toledano soutient que “les César ne sont plus un club de bridge fermé, mais une institution ouverte”, de nombreuses réalisations restent encore à faire. “L’autre gros chantier, c’est d’élargir le collège des votants puisqu’il est encore composé à 64% d’hommes...”, note la maîtresse de cérémonie Marina Foïs dans une interview à Paris Match. Sans oublier le chantier de la diversité, pour qu’on n’en soit plus à “compter les Noirs, les Arabes et les Asiatiques” dans une cérémonie comme le faisait Aïssa Maïga l’an passé.
“L’important, c’est de créer de l’égalité de chances au départ”
Au terme des votes du tour préliminaire, la parité reste un horizon très lointain dans les nominations: une seule femme est nommée dans la catégorie reine de “meilleur film”, Caroline Vignal pour “Antoinette dans les Cévennes”, tout comme pour la “meilleure réalisation” avec Maïwenn pour “ADN”.
Quant à la diversité, notamment ethnique, elle n’apparaît qu’à dose homéopathique dans ces nominations, même si le film “Tout simplement noir” de Jean-Pascal Zadi, succès surprise de l’été 2020, est en lice pour le César du meilleur premier film et celui du meilleur espoir masculin.
“Les votes sont libres, comme les jurys dans les festivals! Il faut continuer à juger les œuvres avec toutes les subjectivités possibles”, commente la co-présidente du collectif 50/50. “Mais l’important c’est de créer de l’égalité de chances au départ” dans le collège des votants “car les cérémonies ont un rôle très concret à jouer dans la lutte contre l’invisibilisation”.
Interrogée par Le HuffPost sur les mesures qu’elle prendrait si elle était présidente de l’Académie des César, l’actrice Aïssa Maïga, aussi membre du collectif qui œuvre en faveur de l’égalité et de la diversité dans le cinéma et l’audiovisuel, évoque notamment l’idée “d’ouvrir la possibilité d’être membre à des personnes plus variées, venues de toutes les couches sociales”. Ou celle de “fixer des conditions” de diversité pour concourir à certaines catégories, comme c’est notamment le cas aux Oscars. La vidéo est à voir ci-dessous:
En attendant que des avancées pour plus de diversité émergent (l’an prochain peut-être) dans les nominations et dans le palmarès, les moments forts de la soirée sont plutôt à attendre du côté de ceux à qui l’on donnera la parole sur la scène de l’Olympia. Restrictions sanitaires obligent, seuls “les nommés, les remettants de chaque César et les personnalités honorées seront conviés”, précise Canal+.
Et si Adèle Haenel a décliné l’invitation de Marina Foïs à venir remettre un prix “pour des raisons qui lui appartiennent”, la maîtresse de cérémonie l’assure: “Il y a 23 César à remettre donc 23 personnes qui monteront sur scène avec des choses à dire”. Si la liste des remettants est pour l’heure tenue secrète, une victoire de Camélia Jordana nommée pour le César de le meilleure actrice conduirait à coup sûr à un discours fort et engagé, ou encore celles de Jean-Pascal Zadi (“Tout simplement noir”), Maïmouna Doucouré et Fathia Youssouf (“Mignonnes”) qui incarnent les nouveaux espoirs de cette diversité.
Sans oublier qu’outre la crise de l’institution des César, la crise sanitaire s’est invitée dans la danse. Déjà fermées de longs mois en 2020, les salles de cinéma n’ont toujours pas allumé leurs projecteurs en 2021 poussant de nombreux acteurs de la profession dans une situation critique et toujours sans perspective. Roselyne Bachelot pourrait donc elle aussi en prendre pour son grade. “Historiquement, le ministre de la Culture est là et s’en prend plein la gueule. Il ne manquerait plus que cette année elle soit épargnée!”, a prévenu Marina Foïs.
Et si la maîtresse de cérémonie ne prétend pas “organiser un meeting politique”, l’actrice est convaincue que cette soirée sera “l’occasion d’écouter une multiplicité de contenus”. Un an après “on se lève et on se casse”, de la place a été faite pour que le mot d’ordre soit “on se lève et on parle”. C’est déjà ça.
À voir également sur Le HuffPost: Aïssa Maïga revient sur le “malaise” de son discours engagé aux César 2020
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